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Singapour, un centre d'impulsion de l'espace mondial




La République de Singapour, proclamée en 1965 après avoir fait brièvement partie de la Fédération de Malaisie entre 1963 et 1965, est un petit État du Sud-Est asiatique (près de cinq fois plus petit que la Belgique) situé à l'extrémité sud de la péninsule malaise. Ce petit archipel formé d'une île principale (île de Singapour : 648 km²) et de près d'une soixantaine d'îlots, dispose d'une position exceptionnelle : séparé de la Malaisie par le détroit de Johore, verrouillant la partie orientale du détroit de Malacca qui met en relation deux espaces maritimes majeurs, l'océan Indien à l'Ouest, la mer de Chine méridionale à l'Est.



La Cité-État de Singapour est une ancienne colonie britannique (1819-1963) qui connut une croissance très rapide, grâce notamment à l'exploitation de l'étain et de l'hévéa en Malaisie. Singapour devint un port important, ainsi que le principal centre financier et administratif de l'Asie du Sud-Est. En 1911, la population de Singapour comptait 250 000 habitants appartenant à 48 groupes ethniques et parlant 54 langues. L'archipel peuplé aujourd'hui de 4,5 millions d'habitants, a une double appartenance géopolitique et culturelle au monde sinisé et malais : les Chinois représentent la majorité de la population, les Malais plus de 10 %. Les Indiens sont également nombreux.




photos de Pierre Letienne

Singapour n'a pas de ressources naturelles, à l'exception de son port en eau profonde, de sa main-d'œuvre industrielle et de sa position géographique stratégique. Á partir de l'indépendance de la cité-État en 1965, le People's Action Party de Lee Kuan Yew, qui dirige le pays d'une poigne de fer, choisit de mener une politique volontariste d'insertion au sein de la mondialisation en cours. 

Merlion (emblème national) et skyline

L'Economic Development Board, qui a été créé dès 1961, transforme Singapour en dragon asiatique grâce à une politique de promotion des exportations fondée sur les industries de main-d'oeuvre. Puis il engage, à partir de 1979, une « seconde révolution industrielle » reposant, cette fois, sur les industries de haute technologie. Celle-ci est relayée en 1989 par la stratégie du « triangle de croissance », qui permet aux industries singapouriennes de se délocaliser dans l'État malais de Johore et sur l'île indonésienne de Batam où abondent terrains et main-d'oeuvre bon marché, alors que l'économie métropolitaine se spécialise dans les services financiers et logistiques.

CBD

L'Autorité de développement des médias (MDA) de Singapour, en mettant en scène ses cadres supérieurs en train de rapper, soigne sa communication et par là même celle de la Cité-État en cherchant à démontrer que Singapour, l'hyperdynamique, est l'un des centres d'impulsion de l'espace mondialisé :





Singapour bénéficie, en effet, pleinement de la croissance des échanges entre la zone Asie-Pacifique et le reste du monde. Bien placée sur les routes maritimes entre l'Asie et l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique, la « ville du lion » (son nom en sanskrit) bénéficie de l'augmentation du trafic avec la Chine comme avec les pays membres de l'ASEAN. 140.000 navires du monde entier y font escale chaque année.

Port de Singapour

Le trafic d'hydrocarbures y est considérable et Singapour s'affirme comme une plaque tournante pour le raffinage et la pétrochimie en Asie.


Iles pétrolières au large de Singapour

Singapour est le premier port à conteneurs du monde, avec plus de 27 millions d'EVP (équivalent vingt pieds), transbordés en 2007. Sa suprématie est cependant menacée par les ports de Hong Kong et, surtout, de Shanghaï, qui connaissent des croissances spectaculaires liées à l'essor économique de la Chine.

Port à conteneurs de Singapour

La Cité-État lutte pour maintenir son rang parmi les premiers ports mondiaux. Favorisée par sa situation géographique, elle investit fortement dans les infrastructures de transports pour devenir un pôle d'échanges incontournable :


  • Port of Singapore Authority (PSA), l'opérateur public en charge des terminaux, a entamé un ambitieux programme d'investissement pour étendre leurs capacités. Quinze nouveaux postes d'amarrage vont entrer progressivement en service. Á l'horizon de 2020, Singapour aura augmenté sa capacité d'accueil de 50 millions d'EVP ; en comparaison, Le Hâvre dispose d'une capacité de 2,6 millions ...

  • L' aéroport international de Changi a accueilli 35 millions de passagers en 2006 (à comparer aux 57 millions de Roissy-CDG). Avec l'agrandissement des deux premiers terminaux, et surtout avec le nouveau terminal 3, ouvert en janvier 2008, Changi porte sa capacité annuelle à 64 millions. Le « hub » de Singapore Airlines (SIA) se hisse ainsi au niveau des plus grands aéroports mondiaux.

  • Le gouvernement de Singapour mène également une politique très volontariste pour le réseau routier : institution d'un péage urbain, développement des transports en commun, disposition d'un réseau routier de 3.200 kilomètres, dont 150 d'autoroutes, un appel d'offres a même été lancé pour la construction d'une autoroute sous-marine.

Singapour est bien l'un des plus spectaculaires succès économiques de l'Asie. Pendant près de quatre décennies sous le leadership du premier ministre Lee Kuan Yew, Singapour s'est transformée en centre de service régional et est devenue un véritable carrefour pour l'Asie du Sud-Est. Sur un espace restreint, une Cité-État au confluent des routes commerciales qui domine un vaste espace en captant ses richesses, comme Venise, Bruges ou Anvers le firent en leur temps. Mais ...


« Tout ce qui est amusant est interdit à Singapour »

 

  • Interdiction de la vente de chewing-gum depuis 1992. Seule la vente de chewing-gum pour des usages médicaux ou dentaires est autorisée, pourvu que le client en pharmacie présente un document d'identité, et, pour les chewing-gums à la nicotine, un certificat médical. Dans son usage courant, le chewing-gum reste interdit à la vente. On peut même avoir une amende si on en transporte dans les poches !

  • Fortes contraventions pour papiers, déchets jetés et pour crachats dans les lieux publics.

  • Interdiction de manger, de boire, de transporter des durians (à l'odeur nauséabonde) ou des bidons d'essence dans les bus et métro (amende d'environ 500 $).

  • Quiconque pris en possession de plus de 13-14 g d'héroine, 28 g de morphine ou 480 g de cannabis est passible de la peine de mort.

  • Interdiction de Playboy et d'autres magazines adultes, répression de l'homosexualité.

  • Censure de la presse, interdiction d'avoir des antennes paraboliques.

  • Interdiction des manifestations sans autorisation et des grèves ...

 

En février 2007, Courrier International consacrait un dossier sur Singapour. Morceaux choisis : « Le modèle politique singapourien est l'aboutissement d'une stratégie très sophistiquée qui vise à contenir, contrôler et manipuler la société… », « Le gouvernement de Singapour part du principe que ce qui importe le plus aux gens dans le quotidien, c'est de vivre en sécurité, d'avoir un emploi sûr, une vie paisible et prospère… », « Le gouvernement est proche de son but : l'idéal d'une société qui sera toujours gouvernée par un groupe d'hommes et de femmes irréprochables, honnêtes et travailleurs, garantissant la probité de leurs successeurs grâce à un système d'autocontrôle et d'auto-renouvellement continus »

Une version détournée du clip du MDA
révèle les vérités politiques dérangeantes du modèle singapourien :



Enfin, pour terminer sur une note un peu plus légère, un petit résumé chanté et parodique de l'Histoire de Singapour et des conditions de vie dans la Cité-État , « We live in Singapura » :


Sources :

Laurent Caroué, La mondialisation en débat, Documentation Photographique, n°8037, 2004

L'encyclopédie de l'Agora

Le port de Singapour à la conquête de l'économie mondiale, Les échos, édition du 11 mars 2008

Wikipédia

Courrier International



26/01/2009

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